La BCE a alloué 529,5 milliards
d’euros lors de son LTRO (Long-Term Refinancing Operation) du 29 février. Une opération de création monétaire qui renforcera surtout le matelas de sécurité des banques.
Après le dernier LTRO du mois de décembre 2011 (analysé
ici par Vincent Benard), la
BCE a récidivé ce 29 février. Elle a en effet réalisé une
opération massive en allouant 529,5 milliards
d’euros de liquidités aux 800 établissements financiers en ayant fait la
demande. D’après les analystes
de Crédit Suisse, BNP Paribas a utilisé le LTRO de février à hauteur de 15
milliards d'euros (vs 20 milliards d'euros en décembre) contre 10 milliards d'euros (vs 12 milliards) pour la Société Générale et
le Crédit Agricole. Après avoir retiré 8
milliards d'euros de liquidités en décembre, Natixis ne se serait cette fois
pas présenté au guichet.
Ces liquidités sont accordées en échanges de collatéraux
apportés en garantie (obligation d’Etat, portefeuille de prêts…). Un haircut est ensuite appliqué :
obtenir 100 de liquidités nécessite de donner un collatéral d’encours
supérieur. L’haircut est d’autant
plus élevé que l’actif est risqué : il faudra par exemple 115 d’un
portefeuille peu risqué mais 160 d’un portefeuille plus risqué.
En tenant compte de l’arrivée à échéance d’opérations de
financement à plus court terme, il y a environ 300 milliards d’euros de
‘nouvelles liquidités’ qui ont été injectées par la BCE. A titre de
comparaison, le LTRO de décembre avait permis d’allouer 489,2 milliards
d’euros, dont 210
milliards d’euros de ‘nouvelles liquidités’.
Cette nouvelle opération portera le bilan de la BCE à un niveau inédit de 32%
du PIB de la zone euro, alors qu’il était déjà le
plus élevé en valeur absolue. A titre de comparaison les bilans de la Fed,
de la Bank of
England et la Bank of Japan ne représentent ‘que’ 21%, 19%
et 30% du PIB de leur zone économique respective. Le mythe de la BCE modèle de rigueur avait d’ailleurs
déjà été détruit, par exemple ici.
L’objectif de la
BCE est de fournir des liquidités aux banques pour qu’elles
se ménagent un coussin de sécurité et qu’elles en transforment une partie en
crédits, qui serait idéalement affectés aux dettes souveraines. Le traité de Lisbonne interdit en effet à la BCE d’acheter la dette des Etats (article 123). Ou plus exactement celle-ci ne peut intervenir sur le marché
primaire (c’est-à-dire acheter des obligations lors de leur émission),
brèche dans laquelle elle s’est engouffrée pour intervenir sur le marché
secondaire. Elle a ainsi commencé à acheter des obligations d'Etat en mai 2010 et son portefeuille
s’élève aujourd’hui à 219
milliards d’euros. Mais contrairement aux espérances de Mario Draghi, la
première chose que se sont empressées de faire les banques avec les liquidités
obtenues, c’est de les replacer…à la
BCE. Au lendemain de l’opération, les dépôts ont atteint
776,9 milliards d’euros avant de culminer à 820 milliards d’euros le 2 mars,
soit 345,6 milliards d’euros de plus que le jour de l’opération. Cela
représente donc plus que les 300 milliards d’euros de nouvelles
liquidités ! Les banques préfèrent ainsi emprunter à 1,00% et replacer à 0,25% plutôt que de prêter aux Etats.
Il n’y aura donc sans doute pas d’augmentation de la
production de nouveaux prêts et l’intervention semblerait juste éviter un credit crunch majeur. Néanmoins cette
fuite en avant par la création monétaire (alors qu’un surcroît d’épargne serait
nécessaire) occasionnera des dégâts bien plus importants dans le futur, comme l’école
autrichienne l’a déjà abondamment expliqué.
L’objectif
de sauver les banques sera-t-il atteint ? Difficile à dire mais il est
clair que la BCE
leur a donné un sacré coup de pouce…au détriment des détenteurs d’euros qui
n’ont pas accès au robinet de la création monétaire.
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