Le mercredi 25 septembre, le projet
de loi de finances pour 2014 (PLF 2014) était présenté
en conseil des ministres à Jean-Marc Ayrault par Pierre Moscovici
(ministre de l’économie et des finances) et Bernard Cazeneuve (ministre délégué
auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé
du budget).
Le gouvernement avait alors auparavant largement
communiqué sur un « effort de redressement » de
18 milliards d’euros, dont 15 milliards d’économies
nouvelles et 3 milliards de recettes. Les 15 milliards d’euros
d’économies étaient censés être
répartis à hauteur de 9 milliards pour l’État et
de 6 milliards pour les régimes sociaux (5,8 milliards finalement).
Pour l’État, les 9 milliards
d’euros d’économies se répartissent ainsi :
- 3,3 milliards sur les concours aux opérateurs, les collectivités locales et le budget européen
- 2,6 milliards sur les dépenses de fonctionnement
- 2,6 milliards sur les dépenses d’investissement et d’interventions
- 0,5 milliard sur les intérêts de la dette souveraine
Les 3 milliards d’euros de recettes
supplémentaires seraient obtenus pour 1 milliard par des impôts
nouveaux et pour 2 milliards par un renforcement de la lutte contre la fraude
et l’optimisation fiscale. Malheureusement, ce calcul semble ignorer
totalement les 10 milliards d’euros de hausse pesant sur les
ménages l’an prochain :
En examinant le PLF
2014, on se rend compte qu’il n’y aura pas de baisse des
dépenses, contrairement à ce qui peut être compris et relaté
dans les médias. Quand le gouvernement parle d’économies,
il compare l’évolution des dépenses constatée par
rapport à l’évolution
« tendancielle ». Si les dépenses augmentent
moins que prévu, alors l’écart constaté est
considéré comme une économie. La
dépense publique augmentera
en fait de 5 milliards d’euros en volume, au lieu de 20 milliards si
aucune mesure d’économie n’était prise. Il y aura
donc en fait une augmentation de 0,5% en volume, c’est-à-dire en
plus de l’inflation (prévue à 1,3% en 2014), ce qui
sera certes un peu moins que les +2 % constatés en moyenne
ces dix dernières années. Pierre Moscovici ne manque
d’ailleurs pas de souligner que « cela revient à diviser par quatre le rythme
d’évolution de la dépense publique ! »
Le phénomène est identique pour
l’État, pour qui 9 milliards d’euros
d’économies sont annoncés. Bercy estimant pour 2014
l'évolution tendancielle des dépenses de l'État (hors
Sécurité sociale) à un peu plus de 7 milliards
d’euros, la baisse ‘réelle’ s’établit
ainsi en 2014 à 1,5 milliard. Ce qui est « inédit sous la
Ve République », ont insisté
Pierre Moscovici et Bernard Cazeneuve.
Mais le ministère des finances a ici
utilisé une autre astuce pour
gonfler artificiellement l’économie : il a surestimé
la hausse tendancielle. Ainsi, Bercy
estime pour 2014 la hausse
tendancielle à 7 milliards d'euros, alors que la Cour des
comptes l'évalue à 6 milliards. L'an dernier,
l’écart était encore plus important (10 milliards d'euros
pour Bercy contre 7 milliards pour la Cour des comptes).
Par ailleurs, le gouvernement communique sur une
évolution des dépenses hors charges de la dette et pensions. Si
l’on veut mesurer l’effort de maîtrise des dépenses
du gouvernement, on peut comprendre la logique de l’exclusion de
l’assiette de la charge de la dette (le gouvernement n’a aucun
pouvoir pour fixer directement les taux d’emprunt). Mais à ce moment là, pourquoi inclure une baisse de cette
même charge de la dette dans le périmètre des
économies sur la dépense publique (0,5 milliard
d’euros) ?
Il est également critiquable de traiter
les pensions comme les intérêts de la dette,
c’est-à-dire comme si le gouvernement n’avait aucune prise
dessus. En effet, il y a eu récemment une (mini-)réforme des
retraites pour laquelle le gouvernement avait l’option de ralentir la
revalorisation des pensions. Il n’a certes pas retenu cette option,
mais il avait la possibilité de le faire.
De plus, la baisse de 1,5 milliard apparaît
comme fictive quand on étudie en détail le PLF 2014 :
BG
= Budget Général
PSR :
prélèvements sur recettes
On s’aperçoit en effet que ladite
baisse est obtenue en excluant les 12 milliards d’euros du programme
d’investissements d’avenir (PIA).
Il est également à noter que 6,7
milliards d'euros d’événements exceptionnels de 2013 ont
disparu : baisse des dépenses du Mécanisme Européen
de Stabilité (MES) pour 3,3 milliards, contrecoup de 1,6 milliard des
dépenses pour la Banque Européenne d’Investissement (BEI)
et 1,8 milliard suite à la hausse exceptionnelle du
prélèvement sur recettes au profit de l’Union
Européenne. Là aussi, on peut comprendre la logique de
l’exclusion des éléments exceptionnels, mais quand il y
en a chaque année, et qui plus est quand leur montant progresse, il
serait plus logique de les prendre en compte. Et même en admettant un
instant que l’on puisse les exclure, pourquoi alors comparer 2013 avec évènements
exceptionnels à 2014 sans
évènement exceptionnel ?
Le budget 2014 ne laisse encore apparaître
aucune réelle réduction des dépenses. Le rythme de
l’augmentation diminue tout de même sensiblement, mais cela
ressemble plus à un choix subi pour cause de croissance
anémique que délibéré.
Publié initialement sur 24hGold
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